a good friend and a glass of wine (matt)

Il y a un air de fête dans les rues de New York. Thanksgiving approche, puis après ça Noël, et les commerces de la Grosse Pomme affichent des décors colorés dans leurs vitrines lumineuses. Il fait déjà sombre, avec l'hiver qui arrive et les journées de plus en plus courtes, et son écharpe a du mal à résister au vent qui lui mord les joues et le nez.

Susan aurait préféré être dans son canapé, une tasse de café dans les mains et lovée contre son époux enfin retrouvé. Une bonne soirée avec du popcorn, un vieux film à deux balles pour éviter de penser à l'engueulade majeure qu'ils ont eue le jour de leurs retrouvailles — un jour qui aurait dû être heureux, et qui s'est vite terni en dépit de toute leur bonne volonté. Elle a encore un peu de mal, un vague relent de colère dont elle n'arrive pas à se débarrasser, en dépit d'une petite voix pernicieuse au fond de son esprit qui lui dit de toute façon tu n'étais pas là pendant cinq ans, tu n'as rien à dire.

Alors malgré tout l'amour qu'elle porte à Reed et en dépit de son envie de rester à l'intérieur, loin du froid mordant de l'extérieur, elle est sortie — parce qu'elle a besoin de respirer, de s'éloigner un peu de la drôle d'atmosphère qui règne à Baxter Building. Et surtout, elle avait promis un dîner à Murdock, en guise de remerciement pour tout ce qu'il a pu faire pour elle, depuis son retour à la vie.

Elle lui a donné rendez-vous à un restaurant japonais qu'ils apprécient tous les deux. Leurs sushis sont excellents, et l'ambiance y est agréable — ça lui semblait une évidence. Elle arrive en avance, comme souvent, mais Matt est ponctuel. Elle l'aperçoit aisément depuis la table qu'elle a réservé, avec ses lunettes fumées et la canne dans ses mains, mais elle attend qu'il s'approche avant de se lever. « Matt, it's good to see you. » Il y a un sourire sur le visage de Sue, et l'étreinte qu'elle lui offre est sincère. « Thank God it's not in your office, for once. No offense, but I was getting sick of seeing it. » Il y a de l'humour dans sa voix.

Une fois les salutations habituelles échangées, elle se rassoit, les deux mains croisées sous le menton. « How have you been ? » Ca fait quelques semaines, maintenant, depuis la dernière fois qu'ils se sont vus. Et en dépit de leurs débuts purement professionnels, elle en est venue à le considérer comme un véritable ami.

@matthew m. murdock

he don't always come at midnight, burnin' red and talking sin. but he knows how to play it just right, if you gonna let him in. - @susan storm-richards

Le froid pointe le bout de son nez, mais toi Matt, t'es éternellement habillé de ton smoking. Un smoking qui te suit depuis longtemps déjà, et qui te représente. L'une de tes marques de fabrique, aussi, et puis...tu aimes tout simplement les smokings, aussi. Le vent glacial te laisse de marbre, alors tu peux te permettre de t'habiller de la même manière toute l'année. Qu'il pleuve, qu'il vente, qu'il fasse canicule ou qu'il neige, tu ne changes pas tes habitudes. La période des fêtes de fin d'année est, en revanche, celle que tu préfères. Tout le monde a la tête dans les festivités, et tu te souviens de Karen qui prenait plaisir à décorer votre cabinet, à l'époque. Avant tout ça, avant le Snap, avant que tout ne s'effondre. Mais désormais, alors que la moitié de l'univers a su retrouver sa place – la même qu'il y a cinq ans, alors que le monde a su évoluer entretemps, tu sens les gens plus heureux. Moins angoissés. Et tu ne peux que les comprendre. Tu as su te reprendre en main lorsqu'ils sont revenus, Foggy et Karen, tes deux meilleurs amis. Ils sont ta famille, la famille que tu as choisi et celle qu'il te reste. Alors ouais, tu peux les comprendre ; t'as été dans leurs chaussures.

Et dans tout ça, tu as su venir en aide à d'innombrables personnes, perdues après cinq ans de disparition. Juridiquement, ça a été la merde, et au final, t'as été overbooké. Mais dans ce lot de personnes, l'une d'entre elles s'est démarqué. Susan Storm, Susan Richards...la Femme Invisible. Evidemment que tu avais entendu parler d'elle, personne à New York City n'avait eu vent des Quatre Fantastiques. Leur popularité à l'époque avait été telle qu'elle a su marquer l'histoire. Le début des années 2000 ont été très bouleversées, de toute manière, entre les mutants, les vampires et les Fantastiques. Le monde a toujours été tel quel, tu le sais, mais vous, en tant que citoyens, certaines choses ont été des premières. C'est surtout la reconnaissance qui a su les mettre en avant. Susan avait fait partie des disparus, et à ta connaissance elle a été la seule de son équipe à avoir subi le Snap. Et petit à petit, vous avez su vous lier d'amitié. Sa douceur correspondait à ta pédagogie, et son dossier avait été classé. Toute son histoire était désormais close, et elle n'était plus ta cliente. Elle était de retour dans le monde des vivants, notamment grâce à toi. C'était une bonne chose, mais tu savais qu'il y avait encore des milliards de personne pour qui ça ne l'était pas.

Ta canne frappe le sol et te guide. La chaleur du restaurant débarrasse tes joues du froid extérieur, et tu entends quelqu'un t'éviter de justesse et s'excuser en remarquant ton handicap, et tu lui réponds qu'il n'y a pas de mal sur ce même ton sympathique que tu as tendance à employer avec tout le monde. Un ton sympathique que l'on ne pouvait te reprocher. Tu t'approches du serveur qui accueille les nouveaux arrivants, tu lui confies que tu as rendez-vous avec quelqu'un – une femme blonde qui t'attendrait peut-être – et il te dirige vers la table en question. Et bientôt, la voix de Susan parvient à tes oreilles. « Good to see you too, Susan. » Tu as ce sourire chaleureux, et tu lui rends son étreinte. Puis enfin, tu t'assois face à elle. Elle blague quant à tes bureaux, mais tu ne peux être plus d'accord avec qu'elle qu'à cet instant. « Believe me, I'm sick of it too. My former office was way better, I promise. I only have this one for, like, a year I guess ? I don't remember exactly. » Tu as un rire, un franc rire à cet humour que tu partages, puis elle te demande comment tu vas. Il est vrai que ça faisait un petit moment que tu ne l'avais pas vue, mais tu ne peux pas la blâmer pour ça. Elle est quand même revenue d'entre les morts, et après la paperasse, il faut bien se reposer et se réadapter à la vie. Surtout lorsqu'on subit un voyage temporel pareil. Enfin, presque, bien sûr. « I should be the one asking you this. » Tu poses ta canne contre le bord de la table, et tu retires tes lunettes pour les poser sur la table, face à toi. Tu te permets, aussi, de retirer le blazer de ton costume, de te tourner, et de le poser sur le dossier de ta chaise. « I'm fine, actually. I've been dealing with a lot of people that were in your situation. » T'as un sourire en coin un peu bête, et tu passes une main sur ton visage. « I've worked a lot lately. That's all I'm talking about. I'm sorry. » Tu prends, évidemment, soin de ne pas lui parler de tes activités de justicier qui te prennent aussi la majorité de ton temps. Ta vie était remplie, mais sans pour autant l'être. « What about you ? Did you finally found your husband ? »

Avant même que Susan n'ait le temps de répondre, une serveuse se présente à vous. Elle tient un carnet entre ses doigts, et un stylo bille. « Welcome to Blue Ribbon Sushis ! Are you ready to order ? » Tu relèves le visage un peu maladroitement vers la serveuse, et tu lui adresses ton sympathique sourire. « Hi. I'm sorry, but we haven't decided yet. » Elle tire deux cartes, remarquant que la table n'en est pas fournie – sûrement une faute au serveur qui est venu, quelques minutes plus tôt, débarrassé et qui n'a pas eu le temps d'en remettre ; il fallait dire qu'il y avait beaucoup de monde, aussi, et elle les pose sous vos nez. « No problem. Don't hesitate to ring me when you have ! » Puis elle repart aussitôt à une autre table.

Il y a du monde dans le restaurant, et l'atmosphère y est plus bruyante que d'habitude, mais c'est agréable. Un sacré changement, comparé au calme parfois pesant de Baxter Building — elle était habituée aux rires francs de Franklin, aux chamailleries constantes entre Johnny et Ben, aux bougonneries de Reed quand quelqu'un l'interrompait pendant ses recherches. L'appartement est silencieux, avec juste eux deux dedans et peut-être que cette atmosphère la rend... tendue.

Les retrouvailles avec Reed n'ont pas été des plus calmes, non plus, et la culpabilité qu'elle ressent par rapport à ça a parfois tendance à lui bouffer l'estomac. Mais elle préfère se taire à ce sujet. Peut-être bien qu'ils auraient tous les deux besoin de thérapie.

Mais pour le moment, elle va se contenter d'apprécier ce dîner avec Matt. Il est toujours tiré à quatre épingles, dans un costume parfaitement repassé, pas un seul cheveu qui dépasse et ses éternelles lunettes teintées de rouge sur le nez. C'est un bel homme, personne ne peut le nier — ce n'est pas la première fois que Sue le remarque, mais elle ne ressent qu'un élan d'affection purement amicale pour lui alors même qu'il lui offre son habituel sourire chaleureux. « I think I've already told you to call me Sue. Repeatedly. » Il y a de l'humour dans sa voix, cependant — au moins a-t-il arrêté de l'appeler Mrs. Richards, et c'est un bon début. Mais elle ne peut s'empêcher de rire à son commentaire sur son bureau, et elle hoche la tête, juste un peu. « Fair enough. Though it's not too shabby either. » Mais elle peut comprendre l'énervement, à rester enfermé entre les mêmes quatre murs toute la journée, cinq à six jours par semaine.

Mais elle préfère lui demander comment il va, et elle tire la langue quand il lui renvoie la question, même s'il ne peut pas le voir. « Pish posh, I've asked first, so you better answer first. » Puéril, elle le sait. Mais elle n'a pas forcément envie de lui répondre. Pas tout de suite, en tout cas. Elle préfère l'écouter, les doigts entrelacés sous son menton, et elle sourit, juste un peu, aux excuses qu'il lui présente. « Don't worry about it. It's pretty interesting, to hear you talk about your work. » Sue n'a jamais vraiment été intéressée par le droit — beaucoup trop de manipulation et de blabla pour son esprit franchement scientifique, mais elle admire ceux qui ont le courage de se lancer dans cette carrière.

Puis il lui pose les questions tant redoutées. Elle se mordille la lèvre inférieure, juste un peu, et considère soigneusement ses réponses quand la serveuse arrive avec deux menus — sans doute aurait-elle pu l'embrasser pour lui avoir offert ces quelques minutes de répit.

Elle sait, cependant, que Matt ne lâchera pas l'affaire, et elle tourne les pages du menu sans vraiment le lire. « I did find Reed, yeah. He was in Wakanda for the past two years. » Sue s'interrompt, considère ses prochaines paroles avec attention, les lèvres pincées et les sourcils froncés. « Let's just say... that our reunion wasn't as happy as I hoped it would be. » Sans doute l'euphémisme de la décennie. « We both said things we meant but said in anger and, well. It's been a little awkward, to say the least. »

Sue a quelque peu abandonné son menu sur le côté. Elle a l'habitude de venir manger ici, de toute façon, et elle sait déjà ce qu'elle va commander — elle se rend compte, aussi, que ça lui fait du bien, de parler de ce qui a pu se passer dans sa vie ces dernières semaines. Il faudrait vraiment qu'elle trouve un psy correct pour extérioriser tout ça.

« He's left Franklin... our son. With Ben — you know, The Thing. He's Franklin's godfather, but... » Elle a du mal à poser des mots corrects sur les émotions qui se bousculent dans son esprit, et finalement elle se contente de secouer un peu la tête, avec un rire dépréciatif. « Anyways. Nothing you can do about it, I suppose. I think I'll have the miso soup... and a shitload of sushi. Feels like I haven't had any in a long while. »

La transition était vraiment parfaite, Sue.

@matthew m. murdock

he don't always come at midnight, burnin' red and talking sin. but he knows how to play it just right, if you gonna let him in. - @susan storm-richards

Bien sûr, tu omets ton activité nocturne. Sue n'est pas au courant, et tu ne sais pas vraiment s'il faudrait qu'elle le soit. Elle a déjà de quoi penser. Les gens ont tendance à s'inquiéter pour toi, notamment à cause de ton handicap, malgré le fait que tu sais te débrouiller indépendamment des autres depuis ton accident. Et puis, tu la sais protectrice. C'est une vraie chance que tu réussisses à camoufler tes bleus, en tout cas. Autrement, elle t'aurait grillé depuis bien longtemps. N'importe qui t'aurait grillé depuis longtemps. Tu as bien réussi à le cacher à tes deux meilleurs amis pendant un bon moment, alors que tu les cotoyais quotidiennement. Le boulot de justicier est solitaire, mais tu n'as pas le choix. Tu ne pouvais pas les mettre en danger. La révélation a faillit tuer Karen, intrépide journaliste qu'elle était. Donc ouais, tu feintes, parce qu'on ne peut pas dire que tu passes ton temps libre à faire autre chose que chasser les péchés d'autrui.

Lorsqu'elle te somme de l'appeler Sue, tu ne peux retenir un sourire. Ms. Richards, puis Susan, puis Sue. Elle était prête à te taper sur les doigts si tu commençais à t'éloigner des formalités qu'elle t'a accordé à prendre, alors t'essayes de t'y tenir à carreau. Tu as un autre sourire lorsqu'elle te raconte que c'était intéressant de t'entendre parler de ton boulot. Tu avais un doute sur le sujet. « Oh, you're being polite. » Et tu ne lui tiendrais pas rigueur si, effectivement, ça l'ennuyait. Toi aussi, parfois, tu avais tendance à trouver tes affaires barbantes. Mais tu as choisis cette voie pour une raison bien spécifique, alors tu t'y tenais. Et ça te tenait à cœur. Tu as déjà fait un écart, ces cinq dernières années, tu ne peux plus te le permettre. Tu te dois de garder la tête haute et bien sur les épaules. Tu as blessé des gens, tu t'es blessé, et tu t'es mis dans de sales affaires dont tu t'extrais tout juste. Ca aussi, tu ne le lui dis pas, à Susan. Tu lui caches bien plus de choses que tu ne le voudrais, alors que pourtant, héroïne depuis le début des années 2000, elle pourrait comprendre. Et elle sait ce que ça peut faire d'être dans tes chaussures. Mais aussi, tes méthodes seraient-elles même approuvées ? Il faut dire que t'es pas un héros, uniquement un justicier. Tu te permets la violence nécessaire pour apporter un peu de paix à ceux qui en ont besoin.

Tu dérives le sujet de toi à elle, et tu remarques bien dans le ton de sa voix que tu touches une corde un peu sensible. Elle t'a parlé, peu après votre première rencontre, de son mari ; qui lui non plus ne t'était pas inconnu. Sa disparition, et les recherches qu'elle tentait désespérément d'entreprendre pour le retrouver. Elle te raconte leurs retrouvailles, qu'elles ne se sont pas passé comme prévu, et même pas du tout. En cinq ans, tu ne pouvais qu'imaginer la difficulté d'une relation pareille. Lorsque Foggy et Karen te sont revenus, tu avais d'abord cru toucher le fond. Tu avais cru devenir fou. Tu avais cru être hanté. Littéralement ; mais alors que l'annonce se diffusait dans le monde entier que les victimes de Thanos étaient de retour, tu t'es senti étranger. Eux, ils vivaient encore cinq ans auparavant. Et toi, tu vivais cinq ans plus tard. Tu n'arrivais pas à te mettre à la place de ceux qui avaient disparu, mais tu voulais les aider. C'est ce qui t'a permis de rencontrer Susan. Elle mentionne son fils, et tu entends sa voix trembler un peu. Ton but n'est pas de la mettre mal à l'aise. Un peu maladroitement, la paume de ta main vient se poser délicatement contre le dos de la sienne. Elle se veut rassurante, tandis que tes lèvres étirent cet éternel sourire. Empathique, sympathique. « It's okay, Sue. I'm sure he's somewhere safe. I'm sure they both are. »

Tu retires ta main, pour venir la glisser à même la table pour venir la poser sur le menu que la serveuse a mit sous ton nez, et cette fois-ci, c'est celui-ci qui glisse à son tour sur le coin de la table. La serveuse revient, et vous débarrasser des deux menus. « So, decided yet ? » Tu laisses Susan prendre la parole en première, et lorsque tu la sens poser les yeux sur toi, tu lui confies ta commande. « I'll have the same. Please. » Tu lui adresses un sourire, même si ton regard demeure dans le vide. La serveuse notre sur son pad votre commande, et tu attends qu'elle reparte avant de reprendre la parole. « And I suppose you guys have no idea where they are ? » C'est une question qui se veut davantage rhétorique qu'une réelle demande. « How long was your husband gone ? Didn't he tried to stay in touch with them ? » Tes questions sont peut-être trop intrusives, et tu ne t'en rends qu'une fois posées. La curiosité est un vilain défaut, que l'on raconte. Et toi, t'as la fâcheuse tendance à l'être. A demander. C'est comme ça que tu fais ton boulot, que ce soit de jour ou de nuit. « We can, of course, talk about something else, if you're not comfortable with this topic. »

Sue n'a jamais été très douée pour parler d'elle-même ou de ses problèmes. Elle aurait préféré gérer ses problèmes de type retour à la vie elle-même, mais elle n'a jamais été une très grande fan des procédés judiciaires, et elle est aujourd'hui infiniment reconnaissante envers Matt pour l'aide précieuse qu'il lui a apportée. Il n'empêche — elle n'aime pas demander de l'aide, elle le sait, et bien qu'elle essaie de se débarrasser de cette mauvaise habitude, c'est quelque chose d'ancré tellement profondément en elle que son premier réflexe reste d'éviter les questions que Matt lui pose pour le moment, et de reporter l'attention sur lui, plutôt. « I'm not, though. It is interesting, for someone who's never been in this kind of trade. Not that I could do your job, though. » Les sciences resteront toujours son premier amour, après tout.

Mais le sujet change, et elle se retrouve sous le regard certes aveugle mais aussi incroyablement perçant de Matt. Sue s'agite un peu sur son siège, change légèrement son centre de gravité — ses épaules se tendent, aussi, sans qu'elle ne le remarque vraiment, mais elle finit par se confier. A demi-mots, avec un tremblement involontaire dans la voix, mais elle raconte ses retrouvailles avec Reed sans pour autant rentrer dans les détails. Met le doigt sur ce qui l'inquiète franchement, surtout — l'absence des trois autres hommes de sa vie, une absence qui bouffe à son anxiété. Et si elle serre la main de Matt dans la sienne avec un peu plus de force que nécessaire, personne ne peut la blâmer pour avoir besoin de réconfort. « Yeah... I mean. I trust Ben with my own life, and I know he'd protect Franklin no matter the cost. It's just... I miss my son. » Une pause. Elle se mâchouille la lèvre inférieure nerveusement. « And I've already missed five years of his life. I don't want to miss any more, if I can help it. » La culpabilité est presque palpable dans sa voix, et elle avale difficilement sa propre salive autour de la boule qui s'est formée dans sa gorge.

Elle ne pourra jamais pardonner Thanos pour ce qu'il a fait. Elle n'a aucun doute qu'elle n'est pas la seule dans ce cas là.

La conversation s'interrompt avec le retour de leur serveuse, qui leur offre un sourire presque éblouissant. Sue ne peut s'empêcher de lui rendre, et opte finalement pour sa soupe miso, ainsi qu'assez de sushis pour nourrir une petite armée. Au pire elle demandera à la jeune femme de lui mettre les restes dans une boîte pour les ramener à Baxter Building — elle se doute que Reed est encore plongé dans une expérience ou une autre et qu'il oubliera de manger. « Well... I know Johnny's out there somewhere. I've dug into enough news websites to know he's still doing... vigilante work, I guess. But he jumps everywhere and the last the country has seen of him, he was somewhere near the Mexico border. » Ca ne l'étonne pas de son frère. Il n'a jamais été doué pour rester hors de l'action — elle se souvient encore de son envie de foncer dans le tas, en 2012, lors de l'invasion Chitauri. « Ben, though... He's surprisingly good at keeping to himself despite looking like a literal boulder. And his name is too common to really pinpoint his location. » Elle soupire, passe une main fatiguée sur son visage. « He was in Wakanda for two years. Didn't warn anyone, from what I've gathered. I only found out he was there because I knew his email password and I found some correspondence with Queen Ramonda. »

Et c'est avec une certaine surprise qu'elle se rend compte que ça lui fait du bien, de tout balancer comme ça. Elle sait qu'elle peut faire confiance à Matt, et qu'il s'efforcera de lui donner des conseils aussi objectifs que possibles. C'est pour ça qu'elle lui sourit, et que c'est à son tour de lui tapoter la main, gentiment. « It's okay. It's... liberating, to speak about that. More than I thought. » Une nouvelle pause, le temps que la serveuse arrive avec leurs plats et les dépose sur la table. « I might have another favor to ask from you, though. »

@matthew m. murdock

he don't always come at midnight, burnin' red and talking sin. but he knows how to play it just right, if you gonna let him in. - @susan storm-richards

Tu ne pouvais pas t'en empêcher.
Ta curiosité l'emporte souvent, et parfois tu peux poser des questions peut-être trop personnelles. Tu ne veux pas la mettre mal à l'aise, bien au contraire. Mais tu veux qu'elle sache que tu es présent pour elle, si elle en a besoin. Que ce soit pour discuter, vider son sac, vouloir des conseils, ou tout simplement une sortie simple entre amis. Le Snap n'a pas été facile à vivre pour vous, pendant cinq années. Mais pour les disparus, c'était encore à vif. C'était encore récent. Et savoir qu'on a perdu cinq années de sa vie, qu'on ne les retrouvera jamais, tu ne peux pas imaginer ce qu'elle peut ressentir. Si elle a pu retrouver son mari, déjà, c'est une bonne chose. Il y avait encore du travail, qu'elle t'annonce. Tu l'entends, sa douleur et sa souffrance, lorsqu'elle te parle des fantastiques manquants. De son fils. Elle serre ta main à son tour.

La serveuse repart après avoir pris votre commande, et tu espères qu'elle ne reviendra pas de si tôt. Tu ne voudrais pas qu'elle devienne un élément perturbant pour ce que Susan est en train de te raconter, Dieu sait que c'est difficile d'être coupé lorsqu'on parle de quelque chose d'aussi important. Tu as souvent été une oreille attentive, que ce soit pour Sue ou bien pour d'autres amis, que ce soit pour Barnes – dont tu t'occupes du suivi actuellement, et sur une durée indéfinie visiblement, ou même pour certains de tes clients. Tu es presque obligé, parce-que tu plaides la cause de l'innocent et de la victime, pas du coupable – sauf lorsque la justice ne te donne pas d'autre choix que d'en défendre, mais tu tâches toujours de faire un effort pour perdre ta propre affaire – parce-que c'est ce qui compte le plus à tes yeux, pour toi : la justice. Et la justice, pour Susan, même si elle ne peut pas récupérer ses cinq dernières années, c'est de pouvoir au moins retrouver sa famille. C'est d'avoir du soutien. Quelqu'il soit. C'est de te tenir disponible, pour elle, mais aussi pour tous les autres qui sont dans sa situation. Vous, les restants, culpabilité du survivant, avez vécu un enfer sans elle, sans tous les disparus, vous avez souffert pendant cinq ans, et si vous avez obtenu justice lorsque le Blip a été fait et que Thanos a été vaincu, tu sais pertinnemment que, pour les victimes du Snap, ce n'est pas encore le cas.
Justice for all.

Elle t'énonce Johnny, que tu devines aisément être son frère – elle n'a même pas besoin de te préciser quelques détails, tant les Quatre Fantastiques ont pu connaître un brin de notoriété il fut à une époque. Tu écoutes ce qu'elle te raconte à propos de Ben aussi, et tu pinces tes lèvres. Détective qui devrait se montrer un minimum fière de ses recherches, tu te rends compte qu'elle peut aisément se débrouiller seule. Mais peut-être qu'un coup de pouce peut aider, néanmoins. Si Johnny a fait parler des siennes, si Johnny laisse des traces – parfois littérales – c'est qu'il y a moyen de le retrouver. Et si Johnny est parti en même temps que Ben, une théorie, alors en le retrouvant, elle retrouvera aussi les autres. Elle obtiendra des réponses. Tu espères, seulement, que ces réponses ne seront pas néfastes. Tu espères, pour elle, qu'ils sont tous encore quelque part, là dehors, peut-être hors des frontières américaines, mais qu'ils sont bien là. Le reste des Fantastiques ne doivent pas être étrangers quant au retour de la moitié de l'univers. C'est un peu le dernier événement tendance de la décennie. Ils se retrouveront. Tu en es certain.

Elle te raconte aussi les aventures de son époux, et tu serres ta mâchoire. Quel genre de personne peut se permettre de laisser derrière elle sa famille d'une telle manière ? Tu n'es pas quelqu'un qui juge aisément les autres, et peut-être y avait-il une raison. Mais il a, quand même, laissé son propre enfant. Tu te doutes qu'il gagnera pas la médaille du père de l'année. Et tu sens, tu entends la légère amertume qui émane de la voix de la blonde. Tu ne peux que te positionner de son côté, tu ne peux que la comprendre. Tu serais fou aussi, à sa place. Tu serais en colère. Ce sont des pensées que tu lui épargneras, néanmoins. Tu n'as pas à donner ton avis sur la question. Mais elle te rassure un peu. Elle te dit que ça la rassure de discuter de ses tracas, et tu as un sourire ; un franc sourire sympathique. Tu avais peur de la braquer, mais tu as réussi à l'ouvrir. « Remember I'll always be there if you need anything, anytime. I mean it. I'd rather you call me at 4am for an emergency than you don't. You can't do everything all alone. And that's normal ; that's what makes you human. Even heroes need help. Or, sometimes, to be saved. » Oh Matt, tu donnes des conseils que tu n'appliques toujours pas à toi-même. C'est facile, pas vrai ? De lâcher des vérités mais de les nier.

Tu entends la voix de la serveuse s'élever une autre fois, et les plats commandés se poser sous vos nez. Au creux de ton estomac, tu peux sentir ta faim se raviver. Tes doigts tracent doucement les contours du bol de soupe, que tu attrapes de tes deux mains. La chaleur vient balayer ton visage, et tu souffles doucement sur le contenu avant de prendre une gorgée. Mais aussitôt tu reposes le bol, qu'elle reprend la parole. Et tu fronces les sourcils. « I'm all ears. » Tu attrapes, entre ton index et ton pouce, un premier sushi que tu fourres entièrement dans ta bouche – même si c'est très peu glamour, tu tâches quand même de garder un semblant d'élégance dans ta manière de manger. Après tout, c'est pas comme si tu pouvais te voir le faire.

Elle parle, et elle parle, et elle parle encore, mais plus les mots sortent de sa bouche et plus elle peut sentir un poids, jusque là invisible, s'évanouir de ses épaules. Sue n'a jamais été du genre à aimer se plaindre, à parler d'elle et de ses problèmes — oh, un coin rationnel de son esprit sait pertinemment que c'est utile, que ça fait du bien, que parfois parler à d'autres personnes permet de mettre en lumière des solutions auxquelles elle n'aurait pas pensé. Il n'empêche, elle déteste ça. Tout simplement parce que ses trente dernières années de vie, c'était elle, la personne vers qui on se confie, la personne à qui on demande de l'aide. Trente ans d'une vie pareille, et elle n'avait jamais vraiment pensé qu'elle aurait peut-être besoin d'être un peu égoïste, elle aussi.

Stop lighting yourself on fire to keep others warm. Johnny lui avait donné ce conseil, peu de temps avant la naissance de Franklin. Sue s'était contentée de prendre la chose à la rigolade, en pointant du doigt que c'était fort, venant du type qui pouvait littéralement prendre feu, mais peut-être qu'elle aurait dû écouter son petit frère, et sa sagesse étonnante venant d'un garçon aussi impulsif.

Et peut-être qu'elle a atteint un trop plein, aussi, et elle fait confiance à Matt, assez pour tout lui balancer sans aucun filtre, et ça fait un bien fou. Elle s'excuserait presque de mettre le poids de ses propres inquiétudes sur ses épaules, mais elle sait déjà ce qu'il lui répondrait, alors elle enfouit son remords bien profondément et se concentre sur le soulagement qu'elle ressent, d'un coup. Même si elle voit la désapprobation qui a aigri son expression quand elle évoque Reed et ses actions des deux dernières années — une désapprobation qui fait écho à la déception qu'elle peut ressentir pour son époux, en dépit de l'amour profond qu'elle lui porte. Une réaction qui la rassure un peu — elle se dit qu'elle a peut-être réagi de façon excessive. Enfin, c'est plus compliqué que ça. Elle sait qu'elle avait raison, sur le fond, mais la forme avait foutrement laissé à désirer, et c'est peut-être ça qu'elle regrette le plus.

Mais ses mots lui arrachent un rire, alors même que la serveuse revient avec leurs plats. Un service rapide, compte tenu du monde en salle — Sue pensera à lui laisser un bon pourboire. « Damn, I feel like I'm listening to Ben all of a sudden. » Mais le sourire ne quitte pas son visage, même s'il se fait un peu doux-amer. Dieux, qu'ils lui manquent, tous les trois. « I'll make sure to remember it. Thanks. For being here. » C'est une amitié qu'elle chérit — une chose bien rare, pour les supers plus habitués à ce qu'on les cherche par appât du gain.

Il n'empêche, elle a tout de même quelque chose à lui demander.

Sue prend le temps de séparer ses baguettes avant de répondre, la voix un peu hésitante. « I think I'll need a private investigator for Ben. I have no idea where he could be. I mean, he grew up in Lower East Side but... » Elle sait assez, au sujet de Ben, pour être certaine qu'il ne s'y installerait pas. Trop de mauvais souvenirs. « I'm not worried about Johnny. Pretty sure that as soon as he knows Reed and I are here, he'll run back to Baxter Building just to beat his ass up. Ben's a tougher cookie to find, though, so if you've got any names to recommend, I'd appreciate it. »

@matthew m. murdock

he don't always come at midnight, burnin' red and talking sin. but he knows how to play it just right, if you gonna let him in. - @susan storm-richards

L'endroit te paraît chaleureux, et les sushis sont délicieux.
Tu connaissais ce restaurant de nom, mais tu n'y étais jamais allé. Quand tu bouffais chinois, généralement c'était au bureau avec Foggy et Karen, et vous commandiez. Quand vous vous décidiez à aller au restaurant, c'était toujours dans des endroits hors de prix et largement au-dessus de vos moyens – du coup, c'était rare que vous y alliez ensemble tous les trois. Les dîners avec des clients n'étaient pas récurrents non plus, et heureusement que tu avais pensé, parce-que les notes étaient folles et exorbitantes. On pourrait croire qu'exercer le métier d'avocat payait bien, mais ça dépendait vachement des situations. Lorsque Nelson, Murdock & Page existait encore, vous aviez quand même atteint une petite renommée qui pouvait vous permettre bien plus de choses qu'à l'accoutumée, mais depuis le Snap, toi, tout seul, tu es retombé si bas que tu es revenu à la case départ. Tu as recommencé en bas de l'échelle, et il a fallut reconstruire tout un temple. Tu espérais que les prix, ici, n'étaient pas trop élevés, mais qu'importe ? ; c'était pas non plus tous les soirs que tu sortais manger avec une amie. Une amie qui se trouve être de charmante compagnie. Ca faisait plusieurs mois que Sue et toi vous vous connaissiez maintenant. Et lorsque tu te souviens de la première fois qu'elle a déboulé dans ton bureau, et qu'elle t'a expliqué sa situation, tu n'aurais jamais juré que vous vous lieriez bien plus. Tu avais peu d'amis, tu ne le cachais pas et tu n'en avais pas honte. Ta confiance devait être méritée – tu as bien assez d'expérience pour savoir qu'il est facile de la mettre à l'envers à quelqu'un – et même lorsque tu fais confiance, tu restes méfiant. Donc oui, tu as peu d'amis ; mais ce peu d'amis, tu sais parfaitement que tu peux compter sur eux coûte que coûte. Et ils savent également qu'ils peuvent compter sur toi, bien sûr. Tu es bien plus altruiste qu'on ne le pense. A vrai dire, c'est bien pour ce trait de caractère que tu t'adonnes au métier d'avocat. Si les gens ont tendance à voir les gens de la justice en mal – ou tout simplement comme des gens chiants, toi tu avais opté pour cette carrière dans l'unique but d'aider autrui ; comme Sue. Et c'est ce qui t'a permis de la rencontrer, d'ailleurs.

Tes conseils la font rire, et si tu aurais pu être offensé par sa réaction, elle t'arrache en réalité un petit sourire. Ben, hein ? Tu espères pouvoir le rencontrer un jour, tu es certain que vous vous entendrez très bien. Mais en tout cas, tes paroles lui font plaisir, et c'était l'effet recherché. Elle a quelque chose à te demander, et tu l'écoutes attentivement. Tu enregistres chacune de tes paroles, et ton sourire s'évanouit un peu. Instinctivement, tes baguettes piquent dans un nouveau sushi, que tu engloutis dans ta bouche. Tu sembles pensif un instant, et tu réfléchis sans véritablement réfléchir. Avec les médias, tu te demandais comment Johnny, Ben et son fils avaient fait pour ne pas voir que les deux derniers membres des Fantastiques étaient de retour. Surtout depuis le Blip, et la réapparition de la moitié de l'univers. C'est pas le genre d'événement qui passerait inaperçu. Tu émets l'hypothèse qu'ils seraient peut-être en danger, alors. Mais c'est une théorie que tu te caches de lui partager ; Sue en a déjà assez bavé comme ça ces derniers moi, tu veux lui offrir ne serait-ce qu'un instant de paix avant qu'elle ne doive affronter tout le reste. Rajouter de l'inquiétude et des problèmes sur son dos n'est pas idéal. Tu finis ta bouchée et, enfin, tu reprends la parole. « I have one. But she- » Comment dire la chose ?

Jessica, tu te souviens parfaitement de son visage. Vous avez travaillé ensemble à plusieurs reprises, fondé les Defenders. Vous les avez dissous, aussi, puis après, plus aucune nouvelle. Elle te collerait certainement son poing dans ta tronche pour cette exacte raison, si même tu avais conscience de sa potentielle disparition. Tu ne sais pas ce qu'elle est devenue, à vrai dire, depuis le Snap. Vous aviez coupé les ponts après une engueulade, t'avais pensé à la recontacter, mais Thanos a claqué des doigts. Et ensuite, ça a été la décadence, et tu n'avais jamais été aussi solitaire que ces cinq dernières années. Encore une fois, ce sont des détails que tu omettais de révéler à Susan, et quelque part, à cet instant précis, tu as un petit pincement au cœur. Combien de fois avais-tu songé à lui annoncer la couleur ? Tu espérais, en tout cas, qu'elle ne te demande pas où tu as rencontré Jones ; sinon, tu serais obligé de lui mentir. Et c'est une chose que tu veux éviter de faire. Tu considères même pas Daredevil être un mensonge, juste quelque chose que tu lui caches. Une vérité encore inavouée. Mais pas un mensonge. Tu déglutis un peu, et tu souffles par tes narines. Non pas que ça t'embête de lui filer le numéro de Jessica, mais tu te rends compte maintenant que tu aurais pu revenir vers elle il y a quelques mois, au moins, après le Blip. Et puis, Jess, c'était une putain d'alcoolique violente à la langue qui fourche bien trop de mots grossiers. Ton dernier souhait serait qu'elles ne s'engueulent pas. Et surtout pour rien – parce-que Jones était désagréable avec tout le monde, et pour absolument aucune et toutes les raisons du monde. « She's special. » Tu ne lui révéleras pas ses capacités hors du commun, de toute manière ce n'est pas un détail que Jessica se permettait de cacher, tu le savais. Elle le verra en temps voulu. « But I think she might be your best shot. She's the best P.I. I've ever met. » Tu pinces des lèvres, et tu avales un deuxième sushi. « I can give you her number. But it's been five years and so ; I don't know where she could be, or what she's doing at the moment. Maybe she retired. I really don't know. I don't even know if she was a victim of Thanos too. » Tu t'adosses contre le dossier de ton siège. « Last time I saw her, she lived in Hell's Kitchen too. Alias Investigation, Jessica Jones. »

En dépit des émotions qui continuent de se battre furieusement dans son esprit, Sue doit admettre que ce dîner entre amis est un excellent moyen de couper court à son nouveau quotidien qui, jusque là, lui a rarement laissé l’occasion de souffler. Oh, ça ne l’empêche pas de poser des questions à Matt, notamment sur un éventuel détective privé qu’il pourrait lui conseiller, mais… Ca fait du bien, un break avec la réalité, aussi ténu soit-il.

Elle se rend compte qu’elle a vraiment foutu sa propre santé mentale à la benne, depuis son retour post-Blip. Il faudrait vraiment qu’elle songe à trouver un bon psy, éventuellement qu’elle trouve le moyen d’y traîner Reed aussi — les Dieux savent à quel point ils en ont besoin, tous les deux. Mais tout ça attendra un plus tard qui n’arrivera sans doute jamais, mais elle se sentira moins coupable si elle se persuade qu’il y a des choses plus importantes à régler avant. Qui sait, peut-être que New York sera attaquée par un robot géant et que ce sera son excuse toute trouvée au fait qu’elle n’a toujours pas pris de rendez-vous médical pour vérifier que tout va bien chez elle.

Matt a l’air gêné par la question, et Sue se contente de l’observer un moment. Elle apprécierait son aide — en sa qualité d’avocat, il a forcément des contacts, mais elle comprendrait s’il préférait les garder pour lui. Elle s’apprête à lui dire, d’ailleurs — il est visiblement mal à l’aise, et ça la surprend assez, quand elle a plutôt l’habitude de le voir avec un sourire rassurant aux lèvres — mais il finit par lui annoncer la couleur, et elle fronce un peu les sourcils. « Special ? How so ? » Désormais, spécial peut simplement dire franchement mauvaise avec tout le monde mais elle a un bon fond, ou bien signifier elle se transforme en gigantesque créature verte quand elle est énervée et casse tout sur son passage, donc fais gaffe à ce que tu dis. Elle ne sait pas trop quelle option elle préférerait, mais elle apprécie l’avertissement, malgré tout.

Et si elle se hâte pour sortir son bon vieux carnet et un stylo de son sac à main, elle finit toutefois par tiquer au nom qu’il lui sort. Jessica Jones — le nom lui dit vaguement quelque chose, mais impossible de mettre le doigt dessus. Il n’empêche, elle note les informations que Matt lui offre. Même si Jones n’est plus présente, peut-être qu’Alias Investigation existe toujours, et qu’ils pourront lui donner un coup de main, aussi minime soit-il. « Thanks, Matt. I appreciate it — truly. » Et même si ça ne la mène qu’à un bâtiment vide… Au moins a-t-il accepté de l’aider en dépit de son malaise évident, et elle apprécie.

Le carnet reprend sa place dans son sac, et elle se reconcentre sur son dîner — les sushis sont délicieux, après tout. « Reed has decided to look into any possible DNA modification after the Snap. » Vraiment, c’est elle qui devrait faire ces recherches — c’est elle la généticienne du couple, mais Reed a insisté, et elle sait pertinemment qu’il déteste ne rien avoir à faire. « I’ll let you know if we find anything, if you want. Who knows what happened to all of us after we got snapped to dust. » Parce que oui, elle est malgré tout d’accord avec cette entreprise. Mieux vaut prévenir que guérir, et elle sait pertinemment à quel point un événement bizarre peut… changer les gens. Elle en est la preuve vivante, après tout.

@matthew m. murdock

he don't always come at midnight, burnin' red and talking sin. but he knows how to play it just right, if you gonna let him in. - @susan storm-richards

Alors que tu évoques Jessica, les souvenirs remontent. Tu te souviens des Defenders, de trois abrutis en costume qui ont essayé de faire la différence. Tu te souviens de vos rivalités constantes, des particularités de chacun des individus qui ont formé le gang. Tu te souviens que vous avez gagné, vous ; une alcoolique, un homme au poing intrépide, un grand gaillard indestructible, et toi, l'aveugle de la bande. Une drôle de combinaison qui a pourtant porté ses fruits. Jessica n'est pas la seule personne dont tu n'as pas pris de nouvelle. Tu n'as pas annoncé ni à Luke ni à Danny que tu étais, en réalité, bien en vie. Tu es un bien piètre compagnon de voyage, mais tu as été tellement occupé lors de ton retour que ça n'a pas pu être ta priorité. Wilson Fisk devait être placé derrière les barreaux pour ses crimes – et enfin, tu y es parvenu. Les événements, ensuite, se sont vite enchaînés. Bien trop vite, et tu as presque perdu le contrôle du rythme de ta vie.
Oh, elle t'en collera une, sûrement, si elle sait que t'es toujours en vie. Et tu sais que c'est inévitable. Elle le saura. Bordel, elle est la meilleure détective privée que tu connaisses. Elle n'a qu'à creuser qu'un tout petit peu pour être au courant ; c'est bien aussi une idée qui t'effraye, à dire vrai. Vous étiez amis, et tu as l'impression de l'avoir trahie. Lorsque Susan te demande en quoi Jessica est spéciale, tu as un sourire. Tu ne saurais dire si c'est de la nostalgie ou même de la tristesse qui passe devant tes yeux. « I guess you'll have to find out. She is safe, though. You don't have to worry about her. It's her problems, and she doesn't like when people stick their noses into her problems. She's a tough one, and she's more than qualified to do the work for you. » Tu ne sais pas vraiment si ça va la rassurer, car tu restes vague sur le personnage. Mais oui, tu la sais qualifiée. Tu sais qu'elle s'attèlera à porter son aide à Susan. Elle doit être débordée, elle aussi, en ces temps ; depuis le retour de la moitié de l'univers, si seulement elle n'en fait pas partie. En tout cas, tu préfères rester mystérieux. Ce n'est pas à toi de révéler à Susan ce qui peut clocher chez elle.

Lorsqu'elle te remercie, néanmoins, tu as un franc sourire. Tu lui as toujours conté que tu serais toujours là pour elle, lorsqu'elle a le moindre souci. Disons que tu as su en prendre l'habitude, et que cette habitude était restée. C'était plus fort que toi. Tu avais ce petit côté protecteur que tu partageais avec Daredevil.

Tu l'observes noter attentivement ce que tu lui confies – à ta manière, du moins ; le numéro de téléphone portable, le nom de la détective privée, mais aussi le nom de son entreprise. Le stylo gratte contre le papier du carnet dans un bruit reconnaissable entre mille. Tu es, encore, frappé d'une petite nostalgie ; ce bruit familier te rappelle encore Karen, qui préparait souvent des bloc-notes qu'elle parsemait à droite et à gauche, ou encore qui griffonnait quelques informations importantes à propos du cabinet. Au tout départ, elle n'utilisait pas vraiment d'ordinateur, et elle préférait bien mieux écrire physiquement ce qu'il y avait à noter. Ca entraîne sa main à ne...well, pas perdre la main en terme d'écriture, et puis ça évitait de perdre une quelconque donnée. Ou en tout cas, ça permettait de la perdre moins facilement. Tu partageais son avis, à vrai dire. Tu entends le calepin de Susan se refermer d'un coup sec, et elle le range. Vous vous concentrez de nouveau sur les sushis, dont l'odeur chatouille encore tes narines, et tu te sers dans ton plat.
Elle reprend la parole, et tu l'écoutes attentivement. Serait-ce vraiment possible ? Tu sais l'ADN de la blonde déjà perturbé depuis de nombreuses années, ce qui lui permettait, d'ailleurs, d'être ce qu'elle était aujourd'hui ; la Femme Invisible, une héroïne, une justicière. C'est aussi ce qui avait su unir tous les membres actuels des Quatre Fantastiques. T'en avais entendu parler, lorsque le groupe de héros avait commencé à user de leurs dons particuliers pour lutter contre le crime. A l'époque, ça avait fait une controverse ; les mutants fraîchement dévoilés aux yeux du monde entier suscitait déjà la crainte et la peur chez les habitants de cette planète, à l'époque si peu habituée aux phénomènes étranges du type. Tu en avais entendu, des choses. Les médias se contredisaient sans cesse, et tu sais que les débuts des Fantastiques n'ont pas été de tout repos. Tu devais bien avouer qu'à l'époque, ça te dépassait un peu tout ça. Tu ne t'y étais pas intéressé plus que ça. Mais, citoyen de New York, il était impossible de ne pas les connaître. Alors peut-être que oui, le Snap a rajouté des dégâts supplémentaires à leurs biologies, mais tu ne l'espérais pas. Généralement, c'était pas bon signe.

Lorsqu'elle te dit qu'elle pourra te mettre au courant des avancées de son mari, tu as un nouveau sourire. Bien sûr que ça t'intéresserait de savoir ; après tout, elle était une amie, et une amie qui était devenue très chère à tes yeux. Tu n'as pas le temps de lui répondre tout de suite, puisque ta bouche est pleine d'un sushi que tu viens tout juste de t'enfiler. Tu attends quelques crocs, le temps de pouvoir lui répondre correctement, et tu hoches doucement le visage. « Sure. I'd like to. Just text me when you know. »

Le repos continue de se dérouler sans encombres particulières. La soirée est agréable, et il fallait bien avouer que la compagnie l'était aussi. Tu étais loin de te douter que les choses entre vous allaient bientôt changer.